Elections professionnelles/représentativité : la cour de cassation apporte de nouvelles précisions

, par udfo30

Le 13 janvier 2010, la Cour de cassation a rendu trois arrêts d’une extrême importance concernant les élections professionnelles et la représentativité syndicale.

Dans un premier arrêt, elle a précisé qu’en cas de liste de commune, la répartition des voix entre les organisations syndicales doit être rendue publique avant le déroulement des élections. L’article L.2122-3 du Code du travail indique lorsqu’une liste commune a été établie par des organisations syndicales la répartition entre elles des suffrages exprimés se fait sur la base indiquée par les organisations syndicales concernées lors du dépôt de leur liste, et à défaut, à parts égales entre les organisations concernées. Il en résulte, pour le Cour de cassation, « que la répartition des suffrages, lorsque les syndicats formant une liste commune ont choisi qu’elle ne soit pas à part égales, doit être portée tant à la connaissance de l’employeur qu’à celle des électeurs de l’entreprise ou de l’établissement concerné avant le déroulement des élections et qu’à défaut, la répartition s’opère à parts égales » (Cass. soc. 13-1-10, n°09-60.208). En l’espèce, FO et la CGC avait fait une liste commune. Ils avaient informé l’employeur d’une répartition des suffrages à hauteur de 55% pour FO et de 45% pour la CGC. La liste commune avait obtenu 19,65% des suffrages exprimés lors des élections qui s’étaient tenues le 27 novembre 2008. Le 19 janvier 2009, FO, revendiquant 10,81% des suffrages exprimés au regard de la répartition indiquée, avait désigné un DS au sein de l’établissement. La Cour de cassation invalide la désignation du DS au motif que ni l’employeur, ni FO et la CGC n’ont pas porté à la connaissance des électeurs avant le déroulement des élections la règle de répartition. En résumé, en cas de liste commune la répartition des suffrages, lorsqu’elle est inégalitaire, doit être portée à la connaissance :

– de l’employeur au moment du dépôt des listes ;

– des électeurs avant le déroulement des élections. Les syndicats faisant une liste commune doivent donc afficher sur leurs panneaux syndicaux, en même temps qu’il informe l’employeur, la règle de répartition des suffrages. Compte tenu des règles de remplacement d’un titulaire et des conditions de désignation d’un RS au CE, il est également vivement conseillé d’indiquer l’étiquette syndicale des candidats se présentant sur la liste commune.

A défaut de respecter cette double information, la réparation des suffrages entre les syndicats de la liste commune se fera à parts égales.

Dans le deuxième arrêt, la Cour de cassation pose clairement les nouvelles conditions de nullité d’un scrutin : « à moins qu’elles soient directement contraires aux principes généraux du droit électoral, les irrégularités commises dans l’organisation et le déroulement du scrutin ne peuvent constituer une cause d’annulation que si elles ont exercé une influence sur le résultat des élections ou depuis l’entrée en vigueur de la loi du 20 août 2008 si, s’agissant du premier tour, elles ont été déterminantes de la qualité représentative des organisations syndicales dans l’entreprise, ou du droit pour un candidat d’être désigné délégué syndical » (Cass. soc. 13-1-10, n°09-60.203). En résumé, l’annulation des élections est toujours encourue, sans qu’il y ait besoin de regarder si les irrégularités ont faussé les résultats du scrutin, lorsqu’il est constaté une violation des principes généraux du droit électoral. En dehors de ce cas, l’annulation des élections n’est possible que s’il est démontré que les irrégularités ont eu une influence sur le résultat des élections ou sur la détermination du seuil des 10% pour la représentativité d’un syndicat ou du seuil des 10% que le candidat doit atteindre pour être désigné comme DS. Il est étonnant que la Cour de cassation ne vise pas également le seuil des 30% exigé pour la signature d’un accord collectif.

Dans un troisième arrêt, la Cour de cassation valide la création d’une section syndicale et la désignation d’un représentant de section syndicale par une union de syndicats dès lors qu’un de ses syndicats affiliés peut revendiquer des adhérents dans l’entreprise considérée (Cass. soc. 13-1-10, n°09-60.155). Dans cette affaire, des syndicats contestés la création d’une section syndicale et la désignation d’un RSS au motif que cette création et cette désignation n’émanaient pas du syndicat présent dans l’entreprise mais de la confédération qui n’avait pas d’adhérents dans l’établissement considéré, les adhérents allégués relevant directement du seul syndicat affilié. La Cour de cassation valide cette désignation en indiquant d’une part, que sauf stipulation contraire des statuts, une union de syndicats (Confédération, Fédération, UD, UL…) à laquelle la loi a reconnu la même capacité civile qu’aux syndicats eux-mêmes peut exercer les droits confédérés à ceux-ci et d’autre part, que l’affiliation d’un syndicat à une union permet à cette dernière de se prévaloir des adhérents du syndicat pour l’exercice des prérogatives découlant des textes susvisés.

La Cour de cassation démontre une nouvelle fois qu’elle entend interpréter de manière souple les critères de représentativité énumérés par l’article L.2121-1 du Code du travail qui sont, rappelons-le, cumulatifs. Dans une précédente décision, les magistrats avaient déjà indiqué que le critère lié au champ professionnel et géographique devait s’apprécier largement : une union de syndicats justifiant, au regard de ses statuts, d’une ancienneté de deux ans dans le champ professionnel et géographique couvrant l’entreprise pouvait désigner un RSS (Cass. soc. 8-9-09, n°09-60.012, voir la chronique FOH du 30 août 2009).