Proposition de reclassement

, par udfo30

M Z

A

Mme Y,
Responsable des Ressources
Humaines de XXX.

Lettre remise sans main propre

Nîmes, le 20 mars 2009

Madame,

En manipulant les notes de « qualités professionnelles » vous avez décidé que le poste supprimé dans la catégorie « gestionnaire planification » à l’occasion du plan de licenciements de la saison 2008 /2009 serait le mien.
Le 12 mars vous m’avez fait remettre une « proposition de reclassement » aux USA, à Memphis (Tennessee)
Vu les « propositions de reclassement » dans l’usine que vous avez faites à des salariés et notamment à certains cadres dont le poste est supprimé dans ce plan de licenciement 2008/2009, je n’ose imaginer » que les « propositions de reclassement » exclusivement vers des pays étrangers que vous avez adressées à certains puissent dénoter une volonté d’éliminer des salariés sur des critères tendancieux et non professionnels. Ce serait une manière d’agir inconcevable dans un groupe éthique comme XXX qui est éminemment respectueux de son personnel.

J’aurais préféré que vous me proposiez un poste à Memphis, capitale des premiers pharaons, fondée il y a près de 5000 ans sur le delta du Nil par le roi Ménès ; mais dans cette Memphis là, il n’y a pas de site XXX. A défaut, me proposer un poste dans la mère-patrie du groupe XXX était une charmante attention.

Je dois quand même vous avouer que j’ai été un peu contrarié de n’avoir qu’une seule « proposition de reclassement » alors que d’autres ont une page entière de propositions alléchantes en Chine ou en Malaisie. Puisque dans votre courrier du 12 mars vous me demandez de vous « faire connaître expressément votre décision d’accepter ou non l’un de ces postes de reclassement » j’ai tourné et retourné en vain votre courrier pour trouver les autres propositions que Memphis. Peut-être les avez vous oubliées ?

J’ai néanmoins étudié votre unique proposition avec la plus grande attention.

Memphis, berceau du blues, du gospel, du Rock & Roll et de la country music, en bordure du mythique fleuve Mississipi est sans conteste un endroit charmant qui a beaucoup d’atouts pour plaire.
« On a tous quelque chose en nous de Tennessee » Même si Memphis est la 4ème ville la plus dangereuse des USA pour la criminalité, elle a un passé et un présent culturel parmi les plus riches du monde. D’Elvis Presley à Justin Timberlake en passant par Jerry Lee Lewis, Otis Reeding, BB King, Tina Turner ou Jeff Buckley, de très grands artistes y ont grandi. Sa voisine Nashville, capitale du Tennessee connaît une vie culturelle aussi intense. Cette ville de Memphis garde aussi toujours très vivace la mémoire de Martin Luther King qui y trouva la mort. Elle est également un symbole d’actualité de la « grande crise » de 1929 que le Président Franklin Delano Roosevelt conjura partiellement en créant la « Tennessee Valley Authority » qui initia le développement économique de cette région.

Les « conditions détaillées » que vous m’avez communiquées, à ma demande, concernant le poste de reclassement que vous me proposez, sont soit peu enthousiasmantes soit très floues :

  le salaire indiqué (« 40804 dollars annuel soit 31400 euros ») est il « en net » ou en « brut » ?
  les horaires de travail indiqués (« de 9H à 17H) sont-ils sur 5 jours ou sur 6 jours par semaine ?
  les « heures supplémentaires qui sont parfois demandées en fin de mois » sont-elle rémunérées » ?
  « 2 semaines de congés acquises au bout d’un an dans l’entreprise », c’est peu ! Sont-elles au moins payées ?
  Vous m’indiquez n’avoir aucune « information particulière concernant la protection sociale et le régime de retraite ». Cela est fort fâcheux puisqu’il s’agit de sujets essentiels. Nul n’ignore qu’il n’y a pas de véritable Sécurité Sociale aux USA et que la protection contre la maladie ainsi que la prévoyance représentent des coûts élevés qui sont en général directement assumés par les salariés eux-mêmes. Si j’acceptais le poste que vous me proposez et si l’usine XXX de Memphis fermait brutalement dans quelques mois comme vient de le faire celle de Bilerica (Massachussetts) quel serait le montant de mon indemnité de licenciement et quels seraient alors mes droits aux ASSEDIC en France ? XXX me paierait-il au moins un billet d’avion pour rentrer en France ?

Vos « conditions détaillées » ne sont en fait pas détaillées du tout et ne fournissent pas tous les éléments permettant de prendre une décision rationnelle et fondée sur la proposition que vous me faites.
Etant de « Nîmes même », je conclu que mon organisme, vu son grand âge, ne pourrait s’habituer au climat subtropical humide de Memphis (voici une trentaine d’années, il avait déjà eu beaucoup à s’habituer pendant 4 ans au climat...de Paris)
De plus, j’aurais beaucoup de peine à abandonner ce qui fut un de mes terrains de jeux d’enfance avant la construction de l’usine en 1971. Par ailleurs, des attaches familiales fortes ne retiennent au pays. Enfin, je n’ai jamais eu pour habitude de partir avant « la fin du film ».

Je suis donc dans l’obligation de décliner votre proposition et, au cas où vous en douteriez, je vous confirme que je ne souhaite pas quitter l’entreprise.

En ce jour 1er de printemps et avec une semaine d’avance, je me permets de vous souhaiter un heureux anniversaire en espérant que vous serez toujours dans l’entreprise pour fêter le suivant.

Je vous prie d’agréer, Madame, l’expression de mes salutations les plus distinguées.

M Z

PS : Je me permets de vous signaler la jurisprudence établie par une décision du Conseil d’Etat du 4 février 2004 : « L’employeur ne peut faire à un salarié protégé une proposition de reclassement à l’étranger que si le salarié a manifesté au préalable sa volonté de s’expatrier ». Au vu de cette jurisprudence, la proposition que vous m’avez faite semble donc illégale (Hé oui !)

Copie : M Petit, Directeur de XXX
M J, Secrétaire du Comité d’Entreprise de XXX-Nîmes
Mme P, Inspectrice du Travail

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